D’où vient cet état qui a aussi bien intéressé
Ajax génie et gloire militaire était aussi un
L’abbé au désert est assailli par une horde
Cette œuvre au graphisme extrêmement précis joue
En insérant des objets de mesure du temps et de
Au centre de cette pièce octogonale aux murs vert
Sortant du cabinet, que dire du tableau du
Au XVIIè, l’artiste va aussi se représenter comme
Comme on l’a évoqué, pour le savoir désormais
Même sentiment (que chez Böcklin) dans le “Moine
A la même époque Nietzsche proclame la mort de
Si le romantisme célèbre la solitude de l’homme
Autre figure de mélancolique présentée dans cette
Le XXe siècle et son lot d'échecs historiques
Trônant au centre de cette ultime salle de
La sortie de l’exposition est indiquée par une
Dada à Berlin, Hanovre, Cologne
C’est à Berlin que deux artistes : Raoul Hausmann et Hannah Höch vont donner ses lettres de noblesse au photomontage
Même si, avant eux, les constructivistes russes et les futuristes italiens l’avaient déjà expérimenté, les dadaïstes allemands en ont exploité toutes les possibilités expressives.
Surnommé le Dadasophe, Hausmann est l’un des principaux photomonteurs de la capitale allemande. Ci-dessous « Le critique d’art », 1919-20.
A côtés d’Hausman, Hannah Höch, Johan Heartfield, George Grosz ont donné des versions singulières et diverses du photomontage, dans lequel prime la dimension polémique. Ci-dessous Hannah Höch, « The beautiful girl », 1919 Johan Heartfield, « Hitler », 1932
Les photomontages sont réalisés à partir des découpes de photographies trouvées dans des journaux et combinées aux éléments typographiques de manchettes de presse. Le plus souvent, ils jouent d’une part sur l’effet dynamique de leur composition et, d’autre part, sur l’impact des lettres et des mots disséminés dans l’œuvre. Mots et lettres y fonctionnent comme des slogans, des cris ou des ordres. Si on s’arrête sur la composition, on s’aperçoit que les notions de plan et d’échelle sont constamment remises en cause. Pour ces photomonteurs, il ne s’agit donc pas de produire du beau tableau, mais du manifeste plastique.
Ces “tableaux-manifestes” se veulent polémiques et percutants dans une société allemande bourgeoise et militariste que les dadaïstes allemands combattent.
Les dadaïstes allemands récusent l’idée traditionnelle d’artiste pour se nommer “monteurs de photos”. Certains d’entre eux comme Heartfield et Grosz se situent à côté des monteurs prolétaires des usines.
Raoul Hausmann (peintre, théoricien, sculpteur, et écrivain) s’est revendiqué l’inventeur, avec Hannah Höch, du photomontage. Les deux artistes ont raconté qu’ils l’avaient découvert lors d’un séjour dans la Baltique. Pendant leur voyage, ils constatèrent que dans chaque famille d’un petit village nommé Heidebrink, « se trouvait accrochée au mur une lithographie en couleurs représentant sur fond de caserne l’image d’un grenadier. » Pour rendre ce mémento militaire plus personnel, la famille avait collé, à la place de la tête du grenadier, un portrait photographique d’un soldat de la famille. “Ce fut comme un éclair, écrit Hausmann, je vis instantanément qu’on pourrait faire des tableaux entièrement composés de photos découpées”.
On sait que collage cubiste a permis une avancée nouvelle dans l’investigation de l’espace. Que pouvait apporter de plus le photomontage ? Eh bien, l’analyse de l’image et son fonctionnement.
Dans son texte “Cinéma synthétique de la peinture” Hausmann écrit : “J’adoptais avec la découverte du photomontage une attitude supraréaliste, qui permet de travailler avec une perspective à plusieurs centres et de superposer des objets et des surfaces”
Une telle liberté d’association permettait à l’artiste d’obtenir des images complexes qui mêlaient l’élément visuel, les lettres, les mots. Ces images réunissaient souvent le monde organique, l’émotionnel et le mécanique.
Prenons le dernier photomontage dadaïste d’Hausmann intitulé “ABCD” (ci-dessous), réalisé vers 1923, quand Dada-Berlin n’existait plus.
Le procédé de montage utilisé par Hausmann est fondé sur la déconstruction et la recomposition des différentes sources de l’image. Cependant, plus encore que dans d’autres photomontages de Hausmann, l’image d’ABCD est disloquée. Du coup, sa perception est constamment gênée par des ruptures de plans suggérant des sens contradictoires.
Le motif central (autoportrait photographique de l’artiste), tient serrées entre les dents les quatre lettres du début de l’alphabet. Autour de l’autoportrait, que voyons-nous ?
Des papiers découpés dans des manuels médicaux, des éléments typographiques à chaque fois différents, des billets de banque tchèques, des allusions à une action Merz, réalisée aux côtés de Schwitters à Hanovre en décembre 1923 (où Hausmann fit une lecture de ses poèmes phonétiques, dans lesquels l’artiste détruisait la langue, en la hachant jusqu’à la priver de son sens).
Si nous y sommes attentifs dans “ABCD”, tous les éléments s’organisent selon plusieurs axes de composition. Malgré le mot voce en relation avec la bouche ouverte du portrait de l’artiste, on ne peut dégager aucun sens cohérent de lecture. Bref, ce qui est à voir et à lire ont la même importance dans ce photomontage où la notion de fond et de profondeur s’abolissent, chaque motif se jouant à la surface de l’œuvre dans l’immédiateté de “l’ici et maintenant”. On peut voir ce photomontage comme un manifeste de l’esthétique du non-art, un cri lancé en même temps à l’œil et à l’oreille du spectateur.
Comment Raoul Hausmann se représentait-il l’homme moderne ?
Sa sculpture “L’esprit de notre temps”, 1919 (ci-dessous) nous en donne un aperçu.
Il s’agit d’une tête mécanique faite à partir d’une marotte de coiffeur en bois, d’un morceau de mètre de couturière, d’un rouage de montre, d’un rouleau de caractère d'imprimerie, d’un gobelet télescopique, de carton blanc, d’un tuyau de pipe.
Comme on le voit, les sens, notamment l’ouie, sont obstrués par des mécanismes, le cerveau étalonné.
Raoul Hausmann et Hannah Höch, disions-nous, ont poussé les limites du photomontage. Höch était la seule femme du club Dada de Berlin. C’est parce que Hausmann estimait son travail plastique qu’elle a pu s’exprimer dans le groupe. Grosz et Heartfield étaient réticents à sa participation à la première foire internationale Dada en1920. Sans l’intercession d’Hausmann, elle n’aurait pu y présenter son célèbre “Coupé au couteau de cuisine” 1919, (absent de l’exposition de Beaubourg), ci-dessous
Ce photomontage est à la fois imposant par ses dimensions (114 x 90 cm) et par son contenu déclaré dans le titre «Coupé au couteau de cuisine dans la dernière époque culturelle de l’Allemagne, celle de la grosse bedaine weimarienne de 1920. »
La confusion, la violence et l’incohérence de l’époque se lisent dans cette œuvre où l’artiste passe en revue les faits marquants de l’année 1920 à Berlin : le désordre politique représenté par l’image de l’empereur Guillaume II - qui avait abdiqué - et les représentants du nouveau pouvoir social-démocrate.
Dans ce photomontage Höch se représente avec d’autres dadaïstes, au milieu d’un monde mécanique moderne avec ses rouages, ses machines, ses locomotives et son mouvement vertigineux. Entre les images photographiques sont insérées des lettres découpées dans des journaux ; elles reprennent des slogans dadaïstes comme Adhérez à Dada ! Dada triomphe !
Dans “Da Dandy”, 1919, (ci-dessous), la virtuosité d’Hannah Höch se révèle dans toute son étendue. A partir de différentes découpes photographiques, Höch met habilement en image la relation d’Hausmann à la femme, une femme qui semble occuper la totalité de sa tête. Dissimulé et pourtant lisible derrière une multitude de visages féminins, le profil de Raoul Hausmann apparaît distinctement au centre de la composition.
La complexité de ce photomontage dans lequel les différents visages féminins s’imbriquent est à l’image de la relation complexe des deux artistes. Les jeunes rivales constituent la tête de l’amant écartelé entre sa femme et Hannah Höch, sa maîtresse. Et pourtant, malgré les difficultés qu’une telle relation implique, tout semble prendre une allure ludique et légère, comme le suggère la découpe photographique de deux pieds de femme élégamment chaussés et esquissant un pas de danse, ou la main nonchalamment allongée, ou encore les perles rimant avec les sourires et les différents appâts féminins. La palette chromatique orchestre harmonieusement les valeurs du noir et du blanc et les tonalités pastels des différents plans.
Toute sa vie, Hannah Höch est restée fidèle à la technique du photomontage et au collage pour exprimer, comme elle le déclara en 1977, « ses critiques, ses sarcasmes, mais aussi ses malheurs et la beauté. »
Hausmann, Höch et l’architecte Johannes Baader représentent la tendance la plus typiquement Dada de Berlin, c’est-à-dire une tendance anarchique, individualiste et artistique.
Une seconde tendance, plus marquée politiquement, compte le photomonteur Johan Heartfield et le peintre George Grosz.
Ces deux artistes réalisent ensemble des photomontages qu’ils ne signent même pas, se contentant d’apposer sur le bord inférieur du collage le texte ‘Grosz-Heartfield mont’ (pour monté), en caractères d’imprimerie.
Comme je l’évoquais, toute à l’heure, le qualificatif monteur leur semble plus approprié pour définir leur travail qui, selon eux, est plus proche de la production mécanique que des techniques artistiques traditionnelles.
Heartfield, dénommé le “Dadamonteur” réalise des œuvres d’une grande force polémique.
Il restera toujours fidèle à l’esthétique du photomontage.
Grosz, lui, fait dialoguer dessin, aquarelle et photomontage dans des œuvres d’un grand impact visuel comme dans “Metropolis”, 1917, “Oncle August”, 1919, “Le coupable”, 1920 (ci-dessous)
Dans ses œuvres, Grosz met à nu les valeurs bourgeoises instituées, comme celle du mariage, les rouages du capitalisme ou l’absurdité de la guerre.
Mouvement international aux ramifications multiples, Dada a aussi eu un foyer à Cologne, marqué par la personnalité de Max Ernst et Jean Arp qui les rejoint en 1919.
Max Ernst crée ses premiers collages dada en 1919. Fidèle à l’esprit dada qui s’est insurgé contre la notion d’artiste et de filiation de l’œuvre, Ernst réalise des collages en duo avec Arp, ces collages intitulés Fatagaga ("Fabri-cation de tableaux garantis gazométriques") sont produits à la chaîne par la "Centrale W/3". Ces collages astucieux sont réalisés à partir de catalogues d'achat par correspondance.
Il est à noter que les collages d’Ernst se différencient à la fois des papiers collés cubistes et des photomontages dadaïstes.
Contrairement aux autres dadaïstes qui n’effacent pas les traces d’emprunts d’images ou de colle, etc., Ernst trompe le regard du spectateur en gommant toute allusion à sa réalisation technique. L’image présentée est donc uniforme, même si elle est absurde.
Le renvoi à la réalité politique et sociale, qui chez Hausmann, Höch ou Heartfield est direct, devient allusion chez Ernst. Avec lui, l’image morcelée, chaotique et violente d’une époque que les Berlinois dénonçaient, s’éloigne. Ou plutôt Ernst la transpose d’un espace réel à un espace mental. “Si ce sont les plumes qui font le plumage, nous dit-il, ce n’est pas la colle qui fait le collage”.
Chez Ernst, le collage naît de la connexion poétique de réalités différentes. De telles œuvres évoqueront de plus en plus l’activité mentale de libre association et le processus de figuration dans le rêve, dont Freud a élucidé la logique inconsciente. Mais, avant de plonger dans la dimension de l’inconscient chère aux surréalistes, les collages dadaïstes de Max Ernst s’attachent à des thématiques comme la guerre ou la destruction ; thématiques qu’il partage avec les autres dadaïstes allemands. Sauf qu’à la différence des autres, Ernst les traite avec distance et ironie. Ci-dessous, Ernst “Deux figures ambiguës”, 1920
Les adjectifs les plus souvent utilisés pour décrire les collages de Max Ernst sont “extraordinaire”, “inquiétant”, “incongru”, “amusant”. Ainsi en va-t-il du minuscule photomontage intitulé “Le Rossignol chinois”, 1920, ci-dessous.
Le centre de la composition est occupé par la photographie d’une bombe aérienne utilisée pendant la Grande Guerre. Cependant, elle est tellement remaniée qu’il est presque impossible de l’identifier . Par ailleurs, les éléments disparates dont l’artiste l’entoure la masquent. Au final, cette bombe n’est plus qu’un hybride d’homme et d’animal. Quant au titre, tiré d’un conte d’Andersen, il désamorce toute idée de violence.
Une fois son photomontage fait, Ernst l’a ensuite photographié et agrandi, de manière à effacer les traces de sa fabrication.
Pour comprendre cette œuvre, il faut rappeler que Max Ernst avait été enrôlé pendant la guerre et qu’il détestait la presse qui glorifiait les performances techniques allemandes lors du premier grand conflit. Dans son Rossignol, Ernst tourne en dérision l’absurde machinerie militaire et ces mêmes revues d’où il a tiré l’élément central de sa composition (la bombe)
L’éventail de l’effervescence créatrice de Dada, où le mot d’ordre liberté a produit des œuvres qui ont révolutionné l’art, la littérature et le cinéma, ne serait pas complet sans l’apport considérable de Kurt Schwitters.
Schwitters s’exprimait par le moyen du collage. A ceci près qu’il en a donné une nouvelle interprétation.
Schwitters était à la fois sculpteur, peintre et poète. Il récitait ses poèmes et sonates de mots, réalisait des tableaux-poèmes et des poèmes optiques. D’une certaine façon, il est l’artiste dadaïste complet, peut-être parce qu’il plaçait l’art avant tout ? De ce fait, il s’opposait à la coloration politique communiste que Dada avait pris au sein de certains cercles en Allemagne.
Disons qu’il était plus proche de l’indépendance radicale que Tzara avait proclamée.
L’ensemble des activités dada de Schwitters peut se regrouper autour du néologisme “Merz”.
Merz est la découpe verbale de “Kommerz und Privat bank”. Ce fragment de mot laisse entendre le commerce de l’art et la douleur (schmerz en allemand). En français “merz” a une résonance scatologique.
Le fragment et son principe d’association et d’expansion sont au cœur du travail plastique et poétique de Schwitters. Ci-dessous “Peinture merz” 1921 et “Construction merz” 1921
Dans ses assemblages, Schwitters intègre, comme les cubistes, différents matériaux. Cependant, il a poussé plus loin cette pratique en travaillant uniquement à partir de déchets qui envahissaient les rues de Berlin ou de Hanovre après guerre. “On peut, écrit-il, crier avec des ordures , c’est ce que je fis, en les collant et les clouant ensemble”
Dans le Cubisme, le collage de l’objet prélevé du réel reste soumis à la peinture qui l’intègre à la composition plastique. Chez Schwitters l’objet et le matériau étrangers constituent à eux seuls l’œuvre.
Réalisant le rêve d’une œuvre qui mêle le plan de l’art et celui de la vie, Schwitters a construit, par accumulation d’objets différents, une immense sculpture qui a occupé l’espace vital de sa maison. Il la nomma “Merzbau”, work in progress non vendable. “Merzbau” conciliait peinture, sculpture et architecture. Elle a été détruite par les nazis en 1939. (photo de merzbau à côté du miroir, plus bas)